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#2 Dance and Agency - Interviewing Makers

Questionnaire to Anne-Marie Jourdenais


After giving Mélanie her questionnaire, we handed a copy of the same to Anne-Marie Jourdenais, her rehearsal director and long time collaborator. Here are her answers.


Comment décrivez-vous les rôles et responsabilité de chacun (performeur, dramaturge, chorégraphe) lors de vos processus de création? Comment ces rôles influencent-ils la création finale?


Performeur : C'est la personne qui reçoit les idées, les propositions et qui a le mandat de les faire exister, de leur donner corps et vie. C'est la matière première, malléable, vivante, coopérative ou récalcitrante avec laquelle le chorégraphe devra composer pour créer son œuvre.


Dramaturge : C'est la personne qui joue le rôle de catalyseur. Celle qui, par ses questions, ses observations, ses commentaires, permet aux idées qui sont en train de prendre forme soit de se cristalliser soit de se diluer. C'est la personne qui a le recul nécessaire pour voir émerger des images, des liens, des sens non prévus, souhaités, perçus par le chorégraphe. C'est un interlocuteur privilégié pour le créateur, c'est un de ses premiers spectateurs.


Chorégraphe : C'est la personne qui souhaite l'existence de l'oeuvre qui s'apprête à voir le jour. C'est celle qui balbutie le premier mot et celle qui aura toujours le dernier mot. C'est la personne par laquelle les choses arrivent. Elle a la responsabilité de générer des idées, des propositions, des mouvements, de donner l'élan.


Chacune de ces personnes aura une influence très spécifique et très forte sur l'oeuvre en gestation. Le chorégraphe, de façon évidente, parce qu'il est celui qui l'invite et l'invente. Les performeurs en l'incarnant, en l'habitant vont, inévitablement altérer, transformer les idées qui leur sont confiées. Et le dramaturge, par le recul qu'il a et que les autres n'ont pas, viendra lui aussi changer le cours de la création à sa façon.


Selon vous quel est l'investissement subjectif des performeurs dans vos créations?


L'investissement subjectif des performeurs dans le travail de Mélanie Demers est énorme. Comme une grande partie du processus de création consiste à improviser à partir d'idées, d'images, de sensations, de thèmes proposés par Mélanie, tout le bagage personnel des performeurs est inévitablement interpellé, mobilisé. C'est la rencontre avec chacun d'eux, avec leur sensibilité particulière, leur histoire unique, leurs préoccupations et leurs priorités qui nourrit Mélanie et l'aide à trouver son chemin. Ce processus demande une immense générosité, une puissante ouverture de la part des performeurs, un abandon à ce qu'ils sont autant qu'à la vision de Mélanie.


Quels aspects de la subjectivité d'un performeur invitez-vous à affecter le travail?


Dans le travail de Mélanie, les performeurs sont régulièrement invités à exister comme « êtres humains » plus que comme « danseurs ». Il sont exposés à une envie puissante de voir transparaître leur intimité, leur façon d'être à travers les mouvements et les idées qui leur sont proposées. La curiosité envers l'individualité de chacun, ce qu'il porte, ce qui le porte, ce qui l'inspire est constamment à l'avant plan.


Ensuite, force est de constater que certaines sensibilités sont plus proches de celle de Mélanie et, qu'au niveau artistique, certaines alliances se tissent plus facilement. Ceci dit, lorsque la sensibilité, la

personnalité d'un performeur est plus distincte de celle de Mélanie émergent souvent des idées, des élans qui ne lui seraient jamais venus spontanément.


La rencontre avec les interprètes est un puissant moteur d'inspiration pour elle. Elle la laisse l'inspirer, la déstabiliser, la dévier avant de choisir à nouveau dans quelles directions elle souhaite se diriger et investiguer pour créer.


Quels aspects de sa personne considérez-vous au démarrage d'une création avec un performeur? En quoi votre subjectivité rencontre-t-elle celle du performeur?


Mélanie prend énormément de temps pour choisir les gens avec qui elle a envie de travailler avant de commencer un nouveau projet. Elle laisse mijoter ses élans, ses instincts, ses attirances pendant des mois. Elle a coutume de dire qu'une fois que les performeurs sont choisis, 50% du travail de création est fait. C'est dire l'influence de ce qu'ils ont sur le travail!


Elle n'analyse pas de façon rationnelle ce qui l'attire chez quelqu'un, c'est très instinctif. Ça englobe l'ensemble de la personne. C'est un peu comme tomber en amour... C'est l'assemblage hétéroclite d'une multitude de grandes et de petits choses qui donne une couleur particulière à chacun. Et certains de ces assemblages nous attirent plus que d'autres, résonnent avec le nôtre mieux que d'autres, nous donnent envie de nous approcher ou de nous éloigner.


Évidemment entrent en ligne de compte : le sexe, l'âge, le type de corps, l'origine, l'histoire personnelle, l'histoire commune avec les collègues... Ça fait partie de l'assemblage, mais aucune de ces caractéristiques n'est, à elle seule, déterminante.


Seul ligne directrice à travers les années, Mélanie dit préférer de loin les « cheval sauvage » aux «chevaux apprivoisés ». Elle aime rencontrer des êtres toujours curieux, parfois indociles et profondément malléables qui savent embrasser une proposition avec passion autant que la dénaturer, l'amener plus loin, la réinventer.


Pouvez-vous identifier quelques caractéristiques personnelles (sexe, âge, type de corps, origine, histoire personnelle, etc.) qui, selon vous ont déjà eu une influence sur votre travail avec un performeur?


Dans le travail de Mélanie, tout a une influence. La matière est constamment portée, inventée, transformée par l'être qui lui donne vit. Ainsi le sexe, l'âge, la taille, le type de corps, l'origine, l'éducation, l'histoire personnelle, l'histoire commune avec les collègues sont incontournables. Leur influence sur le travail est palpable au jour le jour.


Le sexe, le type de corps, l'éducation, l'histoire personnelle inscrivent un rapport à l'autre et au monde spécifique. Qui n'est pas immuable, mais qui détermine beaucoup de choix, artistiques et humains, plus ou moins consciemment.


L'âge influence la disponibilité, la dextérité du corps autant que de l'esprit. Un performeur en début de carrière n'a pas nécessairement développés, entraînés, réveillés toutes ces capacités. Mais l'enthousiasme et la curiosité pallient souvent à ces lacunes. Un performeur en fin de carrière n'a plus nécessairement la même vivacité. Mais l'expérience et la confiance sont irremplaçables.


L'histoire commune entre les gens de l'équipe teinte aussi énormément ce qui émerge en cours de processus. Les élans d'inspiration émergent parfois entre des alliés de longue date, parfois lors de nouvelles rencontres fulgurantes. L'histoire commune se révèle parfois un fardeau, parfois un tremplin.


Qu'est-ce que vous entendez par le terme « une dramaturgie individuelle »?


L'assemblage hétéroclite des expériences d'une personne qui ont fait qu'elle est devenue unique, spécifique, inimitable. Ce que cette personne amène avec elle et qui influence, une création, une relation, une situation... Ses questions, ses priorités, ses intuitions, ses limites, son apparence, ses peurs, ses espoirs, son histoire... Le tout plus ou moins conscients. Le tout pouvant être mis en valeur ou occulter selon les situations, mais à mon avis, jamais complètement occulté.


Y a-t-il autre chose que vous aimeriez que nous abordions?


Je tiens à préciser que j'ai principalement répondu en lien avec les processus de création de Mélanie Demers. Avec d'autres chorégraphes, j'ai vu toutes sortes de manières d’interpeller ou pas, d'intégrer ou pas, la dramaturgie personnelle des performeurs. Mais, dans mon expérience, même ceux qui ont cherché à l'effacer le plus possible n'y sont jamais vraiment arrivé...




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